→ Made o You.

Le monde n'était plus véritablement le même depuis qu'il avait été gracié par les cieux pour faire partit des leurs, afin de les aider en prenant part, à sa façon, à la guerre qui les opposent au force du mal. Jamais, ô grand jamais, il n'aurait pensé que de telles choses puissent réellement exister, qu'elles dépassaient clairement le stade de croyance, pour en réalité prendre tout son sens. Emì avait, comme beaucoup d'autres avant lui, eut beaucoup de mal à croire en ce qu'il voyait, en ce qu'il était, et c'était au terme de ces quatre dernières années qu'il avait enfin compris ce pourquoi Allah l'avait choisi lui, et pas un autre.

Mais les conséquences, même si on lui faisait cadeau d'une seconde vie auquel rien - ou presque - ne pourrait y mettre un terme, lui laissait un goût amer. Ne plus pouvoir voir ses proches lui avait longtemps fait saigner son palpitant, et ce fut, comme pour beaucoup d'anges avant lui, l'un des obstacles les plus difficiles à surmonter. Sentir la douleur des gens aimé durant sa vie humaine sans rien pouvoir y faire en avait rendu fou certains d'entre eux, demandant ainsi le pardon, et de mourir réellement. Mais quelque chose comme une force étrange avait convaincu Emìr de subir cela sans trop rechigner. Bien sûr qu'il avait souffert, bien sûr qu'à de nombreuses reprises il avait craqué, mais ce en quoi il croyait durant sa vie, était devenu réelle. Pour lui, il était devenu un véritable fils d'Allah, en devenant l'un des leurs. C'était une motivation, qui, comme ça, semblait futile, mais pour un tel croyant, était d'une puissance sans égale.

Ainsi, aux termes de ses quatre années de « formation », on lui donna ses premières protégées. D'abords surveillé par un ange d'expérience, il montra rapidement ce pourquoi Allah l'avait choisi, et on lui en attribua de nouvelles dont il aurait la charge seul.

Une, deux, trois... La Quatrième, lorsqu'il vit l'habitation, eut l'effet d'une bombe dans son torse. Des larmes de cristal avaient longtemps coulé sans qu'il ne puisse sauter le cap, que d'aller taper à la porte de cette petite maison qu'il avait commencé à acheter avec elle. Comment diable pouvait-il lui faire ça à lui ? Pourquoi lui avait fait enduré ses quatre années sans la voir, pour la lui mettre entre les mains maintenant ? Était-elle une sorcière ? Ou peut-être un ange en devenir ? Ou encore, peut-être qu'elle allait être une personne majeure pour son pays à cause de ces idées visionnaires ? Emìr n'en savait rien, mais la douleur qu'il éprouvait en son cœur le paralysa longtemps.

Et il y avait de quoi. Car si lui avait longtemps souffert de cette absence, comment elle le vivait au jour le jour ? Le savoir mort alors que leur avenir semblait être fait à deux, avait dû être terrible à vivre. Mais le pire dans tout ça, c'était de savoir comment cette dernière allait réagir en le voyant là, devant le seuil. Et si elle l'acceptait, comme diable allait-elle le vivre, l'expliquer aux autres ? Emìr était totalement effrayé, et c'est ce pourquoi il mit si longtemps à se décider malgré les demandes plus qu'explicite de ses supérieurs.

Il attendit la tombée de la nuit, en cette magnifique journée de mars 2013. Le temps était clément, et alors que le soleil se cachait doucement à l'horizon, une douce brise légèrement rafraîchissante balayée SunnyDale Avenue. Les cheveux légèrement ébouriffés par la brise, il se décida finalement, entendant comme un son de cloche dans sa tête, comme si on le félicitait en haut-lieu.

Gravissant les marches du perron avec la boule au ventre, il se passa une main dans les cheveux, regardant à droite, comme à gauche, jouant de ses pieds, comme si il trouvait les mots, puis, finalement, il appuya sur la sonnette, sans savoir réellement ce qu'il allait lui dire pour lui expliquer... Tout ça.

Quand on a le coeur tendre c'est qu'on a pas assez pris de coups. Du moins c'est ce qu'aurait pu dire Siobhán à Coltrane entre deux bières devant ce nanar minable qui retenait toute leur attention. Ou presque dans le cas de Coltrane. Il se demandait parfois à la regarder sourire comme ça si cette petite nuance de gris orage dans son regard finirait par s'éclipser un jour. Ce jour-là serait le bon jour pour elle et de fait, ce serait le bon jour pour lui.

Voilà presque un an, Coltrane Mayfair était entré dans un bar de San Francisco. The Aliby. En avisant de loin la devanture, il s'était dit, quoi de plus anachronique d'un néo-orléanais pur cru qui vient poser son cul sur le tweed vert leprechaun d'un bar irlandais. Si Siobhán Mc Gill Fhaolain avait pu lire ses pensées à ce moment précis, elle lui serait tombée sur le paletot en lui faisait remarquer que c'était un bar écossais. Si elle lui était tombée dessus à ce moment-là, ils ne seraient peut-être pas devenus si proches. En fait, ce n'est qu'une heure après que Siobhán était tombée sur Coltrane, plus ou moins littéralement, un large halo noir autour de l'oeil, une lèvre fendue et un poing amoché. Ne jamais refermer ses doigts sur son pouce quand on a l'intention de frapper fort mais elle avait plutôt l'air d'une gamine des banlieues chics complètement paumé que d'une cendrillon du ghetto. Coltrane avait l'oeil pour ça. S'il avait été dans son quartier, il aurait pratiquement été tenue de la laisser se démerder. Imbibée qu'elle était, avec sa paire de chaussures griffées elle ne serait pas allée bien loin. En y repensant il aurait même pu la laisser se démerder ce soir-là derrière l'Aliby. Après tout, il ne lui devait rien à cette fille, mais il avait bon coeur et déjà pris pas mal de coup là d'où il venait, alors tout compte fait...

Après ça il était revenu frapper chez elle, pour voir comment elle allait. Il l'avait trouvée avec un flingue mais dans ses mains ça aurait tout aussi bien pu être une binette de jardinage. Il n'avait jamais rien vu d'aussi ridicule. Puis il était revenu et ensuite c'était elle qui venait. Ils avaient commencé par parler de trucs futiles puis de la vie dans les gangs et des mecs violents. Puis Coltrane était reparti pour L.A sans vraiment oublier la blondine à l'air déboussolé. C'était probablement là qu'il s'était dit qu'il ferait quelque chose pour elle. Un jour. Pourquoi pas.

De son côté Siobhán ne s'était rien dit du tout. Elle s'était pris la tête avec Niamh et Tuilelaith, ses soeurs. Toujours à propos de la même chose. Puis elle s'était pris la tête avec Kaprice, avec qui elle était comme cul et chemise d'ordinaire, cette fois justement à cause de son excès de sociabilité envers la gente masculine. Puis Coltrane avait réapparu. Il entrait en fac de droit et comme il était le premier de sa famille toutes générations confondues à le faire, il fallait qu'il fasse ça bien. Il n'y avait pas vraiment de rapport avec sa dispute avec Kaprice mais Siobhán avait plus ou moins décidé de repartir du bon pied à partir de là. Quelque part, si Kaprice avait elle même souvent fait preuve d'un excès de sociabilité envers la gente masculine qui fréquentait leur bar attitré, ça ne lui ressemblait pas à elle. Dans leur binôme, elle était celle qui n'avait jamais su draguer, celle qui tombait amoureuse tout de suite et pour rien et surtout, qui balançait tout au moment où il ne fallait pas. C'était ce qui avait plu à Emìr entre autre. Typiquement le genre de chose qui ne pouvait plaire qu'à lui parce qu'il était précisément tout l'opposé de ça. Parce que c'était précisément ce qu'il croyait exécrer le plus au monde. Vous savez... ce genre de personnes. Les optimistes. Les naïfs. Les toujours-heureux-de-vivre. Ce qui empestent le bonheur à douze kilomètres et qui trouvent toujours un bon côté à tout...

Coltrane n'était as du genre à tendre l'autre joue mais ce parfum-là, il aimait bien lui aussi. Pourtant il fallait vraiment être attentif pour déceler cette fille-là derrière celle qui se tenait à côté de lui, plongée dans son film. Pourtant elle était là quelque part. Loin.

Coltrane et Siobhán n'avaient jamais parlé d'Emìr. Ou si! une fois. A la Nouvelle-Orléans. Ce weekend leur avait fait un bien fou à tous les deux. C'est là que les choses avaient commencé à devenir ambiguës. Non pas qu'ils ne l'aient pas vu venir l'un comme l'autre mais, là il y avait vraiment quelque chose. C'était peut-être ce qui rendait le film si intéressant. Pendant qu'elle était tout entière aux dialogues creux des protagonistes, elle écoutait beaucoup moins son propre dialogue intérieur.

Après Emìr il y avait tout eu et il n'y avait rien eu. Elle avait quitté la fac. Elle avait décidé de prendre les choses comme elle viendrait et de ne plus rien planifier. Ses soeurs appelaient ça "une dépression carrément inquiétante", elle elle avait plutôt appelé ça "une forme de bouddhisme new age". Bref après ça, elle s'était quand même dit que prendre un boulot pour payer les factures ça ne serait pas mal non plus. D'ordinaire ce genre de trucs c'était lui qui s'en était toujours occupé. La chaudière aussi. Et les coupures d'électricité aussi. Ce genre de choses n'arrivaient jamais avant, comme si quelqu'un là haut avait décidé que dans l'ordre des choses, il était bien pu divertissant (mais pour qui?) que ce genre d'évènement survienne quand vous n'aviez personne pour vous donner un coup de main. L'ironie du barbu qui trônait en haut la dépassait quelque fois. Elle avait fini par s'y faire et par payer les factures en temps et en heure, ce qui lui évitait déjà pas mal de déconvenues.

En quatre, il y avait pourtant quelque chose qu'elle n'avait toujours pas appris à faire. La cuisine. On ne l'y mettrait plus maintenant. A trente ans passé, son abonnement chez tous les restau ethniques du coin faisait regretter tous les jours à l'inventeur du concept de la carte fidélité le moment où il avait cru trouver une idée lumineuse. Après avoir gagner un an de repas chez M. Ming, je vous laisse imaginer que le frigo dans la cuisine était plus là pour l'aider à se repérer quand elle se levait la nuit pour prendre un verre de lait qu'autre chose. Bref, ce soir ne ferait pas exception...



La sonnette de la porte d'entrée retenti. Un petit dring pas agressif du tout qui ressemblait bien à la propriétaire de la baraque. Un peu acidulé mais pas tant que ça quand on y repensait. Au début Coltrane se dit qu'il allait ignorer ça. Après tout ce n'était pas chez lui et il y avait très peu de chance que Siobhán sonne pour entrer chez elle. Il resta donc affalé sur le canapé jusqu'à ce que sa culpabilité ne vienne lui donner un grand coup dans le train et qu'il ne se décide enfin à ouvrir. De l'autre côté de la porte, un mec typé, pas vraiment le gabarit de la blondinette qui était sortie prendre leur repas au coin de la rue.

- Eh mec, si c'est pour le tandoori on avait dit que c'était pas la peine de ...

La différence entre un pakistanais et un turc n'était pas flagrante et l'eût-elle été que Coltrane n'aurait probablement pas fait la différence. Une chance Siobhán revenait justement, il n'aurait pas besoin de passer pour le mec relou qui n'a pas envie de payer ni de prendre sa commande (ce qu'il aurait de toute façon fini par faire).

- Y a un soucis? demanda Siobhán dans le dos du visiteur.

Pendant une fraction de seconde elle se dit qu'il avait un peu la même carrure qu'Emìr. Bien sûr c'était parfaitement ridicule comme remarque mais ça lui arrivait souvent de se faire ce genre de réflexion. Parfois en ville, elle pensait l'apercevoir et immédiatement elle avait cette étincelle qui s'allumait dans leregard comme si elle avait pu sincèrement y croire. Ça ne durait qu'une fraction de seconde. Comme un espèce de réflexe abâtardi. Généralement ça lui gâchait la journée. Parfois elle passait complètement outre.

Cette fois-ci serait différente. Lorsqu'il se retourna, elle sentit quelque chose la frapper de l'intérieur avec une rare violence. Son visage se décomposa. Le monde autour d'elle se réduit à cette seule et grotesque apparition de l'objet de son deuil si amoureusement observé. La voix de Coltrane. Sa main sur son épaule. Son jean plein de Koftas et de tandoori. Les sacs rouge et or marqués "Kohinoor" éventrés sur le trottoir. Rien de tout cela n'existait. Elle ne voyait plus qu'en canon de fusil et, si Emìr avait aimé la douceur de sa joie de vivre, il ne douterait pas un seul instant que ce fusil là allait faire feu d'une minute à l'autre et qu'il serait impitoyable par ce que Siobhán avait toujours eu le sale caractère de son grand-père et la puissance de feu d'un vrai dragon quand elle était en colère. Et là elle aurait eu toutes les raisons de l'être. Comprenez-là. Elle ne tirait pas encore de conclusions hâtives mais, soit c'était un canular soit ça n'en n'était pas un et dans tous les cas, c'était vraiment de très mauvais goût.

- Est-ce que ça va?
- ... ... euh... oui... je crois... on devrait remettre à plus tard pour ce soir. Si ça te dérange pas...

Etrange mais il ne poserait pas de question. On apprenait ça aussi dans les gangs. Aussi curieux que ça puisse paraître après l'avoir ramassée en piteux état dans une ruelle miteuse, il savait qu'il pouvait quand même lui faire confiance si elle disait pouvoir gérer ça. Ca? Il ne savait pas exactement "ça" quoi. Tout ce qu'il savait c'était qu'il garderait un oeil sur tout ça. Sa casquette vissée sur sa tête, il fit un signe de la main et descendit la ruelle. Siobhán ne le suivit pas du regard, elle avait toujours le regard planté dans celui du "livreur". Elle finit par se décider à le doubler et entrer chez elle, comme pour temporiser un peu ce qu'il allait se passer. Tout chez lui lui laissait penser que ce n'était pas un canular. Que la seule chose quia vait été un canular c'était sa mort. Son deuil à elle. Ses quatre années de sa vie foutues en l'air et pire, tout ce temps perdu à tirer des projets sur la comète avec lui. Et pourtant elle y avait cru, dur comme fer. Jusqu'à tout perdre en le perdant lui.

- T'es venu pour quoi? tes affaires? les intérêts de la maison? Ou alors c'est peut-être ça que tu veux?, à mesure qu'elle jetait ces questions qui n'attendaient pas de réponses (surtout pas), le ton montait. A la fin elle hurlait déjà alors qu'elle s'était promis de n'être que froideur. La froideur ça n'avait jamais été son fort. Comme elle concluait, elle lui jetait un délicat collier d'or qu'il lui avait offert au début de leur relation et qu'elle n'avait jamais enlevé. Pour le coup le fermoir était probablement cassé mais elle s'en fichait éperdument. Ramassant d'un geste brusque les sacs de chez Kohinoor, elle les lui colla dans les bras, qu'importe s'ils étaient plein de sauce. Qu'importe tout. Elle le poussait violemment prête à lui claquer la porte au nez. A quoi bon savoir pourquoi tout ça? Au bout de quatre ans il était tant de tourner la page et là, il lui donnait toutes les raisons de le faire.

Sans lui laisser le temps de rien dire, elle se ravisa et disparut. Entre temps, les voisins étaient sortis pour voir ce qui se passait. La plupart n'avaient pas connu Emìr parce que ça n'était pas le mec le plus sociable de la terre et l'autre part parce qu'ils ne s'intéressaient plus depuis longtemps aux types que fréquentait leur voisine. A une période ils avaient perdu le compte et, même s'il n'y en avait pas eu tant que ça avant cette période précise, ils n'avaient gardé que ça en tête.

Voilà que notre furieux aux cheveux blonds réapparaissaient, une blinde de sac en plastique dans les bras. Tant qu'elle disparaissait complètement derrière. Elle les jeta à Emìr, déterminée. C'était probablement la scène de ménage dont Mme Van Dijk avait rêvé toute sa vie. Ne manquait plus qu'une baffe et la boucle était bouclée...

« Eh mec, si c'est pour le tandoori on avait dit que c'était pas la peine de ... »
« Pardon !?! ?! »
« Y a un soucis ? »

C'était qui ce gars-là ? Est-ce qu'elle l'avait... Non... Elle l'avait déjà remplacé ? Emìr lui lança un regard assassin, avant de faire quelques pas en arrière, puis de se retourner pour tomber face à Siobhán qui arrivait face à lui, les bras remplies de tandoori qui tombèrent au sol, au moment où leurs regards se croisèrent. Emìr sentit son cœur tombait en piquer dans son ventre, fracassant son estomac contre ses entrailles. Il baissa le regard, tandis qu'elle semblait devenir rouge, comme pris d'une intense colère qu'elle ne pouvait masquer. C'était comme si il l'avait abandonné pendant de longues années, pour réapparaître un jour, comme ça, comme un cheveux sur la soupe. Il ne savait pas quoi dire, quoi faire pour la rassurer, pour lui expliquer, pour lui faire comprendre, il se retourna vers le grand black, lui lançant un regard type du : dégage, on a pas besoin de toi dans nos pattes.

« Est-ce que ça va ? »

Sérieusement ? Devait-on réellement lui répondre ?

« ... ... euh... oui... je crois... on devrait remettre à plus tard pour ce soir. Si ça te dérange pas... »

Emìr lui lança un regard insistant, le suivant des yeux, avec une furieuse envie de lui arracher la tête, avant de sentir Siobhán le contourner pour entrer chez elle. À ce moment-là, Emìr se retourna vers le belle blonde, qui prit la parole, de façon crescendo :

« T'es venu pour quoi? tes affaires? les intérêts de la maison? Ou alors c'est peut-être ça que tu veux? »
« Je... Hein ?! ?!! »

Il n'eut pas le temps de la retenir que déjà elle quittait le seuil de la porte, le laissant là, sur le perron, l'air con et désemparé, sans savoir ce qu'il devait faire. Devait-il entrer, et fermer la porte derrière lui ? Il fallait qu'il lui explique les choses et vite, avant que cela ne dégénère. Se passant la main dans les cheveux, dansant d'un pieds à l'autre, jusqu'à ce qu'elle réapparaisse, en lui balançant un sac en plastique avec ses affaires, visiblement, qu'elle avait gardé malgré son absence. Même si il l'intercepta du bout des doigts, sentant la colère le prendre à son tour, il ne put s'empêcher de noter la délicate attention de Siobhán à son encontre en les gardant pendant plus de quatre ans.

« Hey, mais putain, mais... Mais laisse-moi au moins le temps de t'expliquer... ! »

Il la suivit dans la maison, posant ses affaires dans l'entrée, avant de claquer la porte derrière lui, faisant ainsi un magnifique fuck silencieux à cette madame Van Djik. Il entra à son tour dans le salon, jetant un rapide regard furtif à la décoration qui n'avait guère trop changé depuis la dernière fois qu'il était venu.

« Écoute, je... Euh... J'ai une bonne raison, mais tu vas sûrement me prendre pour un demeuré, alors euh... »

Ne sachant pas quoi dire, en réalité, pour crever l'abcès, et rentrer directement dans le vif du sujet, il déploya ses ailes d'ange, le regard devenant légèrement bleuté. C'était peut-être un peu trop... Un peu trop déplacé, ou osé, mais Emìr, malgré ces diverses tentatives de trouver une excuse, une explication pour Siobhán, n'avait rien trouvé de mieux. Il baissa le regard, comme empli d'une culpabilité particulièrement douloureuse.

« Hey, mais putain, mais... Mais laisse-moi au moins le temps de t'expliquer... ! »
- Expliquer pour quoi faire?! Holy cun' !!!!... Tu sais quoi? peu importe, le mieux c'est encore de continuer de faire comme si t'étais mort!, jeta-t-elle en allant chercher d'autres sacs.

L'écossaise n'était pas prête de la lui pardonner celle-là et pour tout dire, à cet instant précis elle était en train de maudire le ciel qu'il ne soit pas resté six pieds sous terre. Ça lui aurait laissé de jolis souvenirs pour s'endormir le soir.

Les larmes montaient de rage tandis qu'elle s'apprêtait à lui expliquer à sa façon :

-Mais merde! MERDE!!! Dégages! Dé-

Inutile de dire que sous les éclats de sa propre voix, elle n'écoutait pas un mot de ce qu'il pouvait bien lui dire. Sans doute alors que la seule façon de la calmer, de se faire entendre, c'était encore de faire quelque chose de complètement irrationnel. Quelque chose suffisamment choquant pour qu'elle la ferme et inutile de dire que ce n'était même pas la peine d'essayer de l'embrasser...

-Ho- ... merde...

Siobhán restait plantée là au milieu du salon, littéralement scotchée par ce qu'Emìr venait de faire. Il se passa bien cinq minutes où elle ne dit plus rien du tout, où elle ne bougea pas puis, sans plus donner d'explication, elle se jeta dans ses bras comme avant.

Elle ferma les yeux, sentir sa chaleur, son odeur, comme si c'était vrai... mais elle se fichait du temps que ça durerait. En le perdant elle avait appris à profiter de l'instant présent et c'était bien ce qu'elle comptait faire. Les larmes coulaient plus librement sur son visage mais elle avait un sourire radieux. Elle posa ses lèvres sur les siennes sans chercher à s'excuser ni même à avoir les explications qu'il lui avait promises. On s'en fichait non? Si ça ne devait durer que cinq secondes autant les rendre inoubliables...

- Tu me manques tellement m'eudail...

« Ho- ... merde...»

Oui, c'était aussi la première réaction qu'il avait eut lorsqu'il s'était réveillé à quelques milliers de miles plus haut. Il redressa brièvement son regard, comme pour observer sa réaction, avant de finalement les camoufler de nouveau, retrouver une douce couleur noisette-ambrée. Il n'eut juste que le temps d'écarter ses bras pour la saisir contre lui lorsqu'elle vint vers lui. Emìr resserra son emprise sur cette dernière, posant sa tête contre son épaule.

« Tu me manques tellement m'eudail... »

Il la serra un peu plus fort contre lui, avant de la repousser légèrement pour lui lever le menton avec délicatesse. Il déposa doucement ses lèvres sur les siennes.

« Toi aussi, tu m'as manqué, Fiona. »

Emìr l'embrassa de nouveau, avant de prendre la direction de la cuisine tout en la menant avec lui en la tirant par la main. Il n'avait visiblement pas perdu ses marques puisqu'il retrouva non sans mal les verres qu'il remplit d'eau fraîche. Il lui en tendit un, avant de s'asseoir à demi sur levier, tout en continuant la discussion comme si elle ne s'était pas interrompue.

« Je... Quand je... me suis réveillé à nouveau, Je t'ai entendu, j'ai entendu ton chagrin, ta tristesse... J'ai tout de suite voulu redescendre pour te retrouver, mais ils m'en ont interdit, ils ne souhaitaient pas que je t'en fasse baver un peu plus après le traumatisme de ma mort, mais... Mais là, ils m'ont envoyé à tes côtés pour des raisons que j'ignore totalement, vu que ça va à l'encontre de ce qu'ils... 'fin... » Il avala une bonne rasade d'eau avant de reprendre : « Je voulais venir, mais... Mais j'avais peur de te faire souffrir de nouveau sans réellement savoir si j'allais rester ou pas, mais aussi combien de temps... » Il posa son verre sur le plan de travail. « Mais visiblement, je suis de retour dans ta vie pour te protéger à nouveau. » Il lui fit un sourire amoureux, avant de reprendre son verre.

Elle n'aurait pas su dire combien de fois en s'endormant elle s'était imaginé cette scène. Bien sûr c'était trop fleur bleue pour être vrai. Bien sûr elle regardait trop de séries à l'eau de rose. Bien sûr... elle savait tout ça mais elle aurait donné n'importe quoi pour ne pas savoir. Qu'importe, tout était tellement parfait. Exactement comme avant.

Elle écoutait ce qu'il lui disait attentivement, plus parce qu'elle savourait chaque mot qu'autre chose d'ailleurs. Il aurait pu ouvrir un dictionnaire et le lui lire qu'elle aurait eu l'air tout aussi conquise. Malgré tout, un étrange sourire pointait sur ses lèvres quand enfin elle se décida à prendre la parole :

- J'ai aucune idée de ce dont tu me parles ça à l'air d'être... du grand n'importe quoi. Mais je m'en fous. J'ai envie de profiter de ce moment avec toi puisque c'est le seul que j'ai eu en quatre ans et s'il faut le seul que j'aurais plus jamais.

Disant cela elle prit sa main et vint encore se lover contre lui. C'était comme si elle se fichait de tout sauf d'être avec lui. En temps normal on aurait pu dire que ça ne lui ressemblait pas mais là? c'était sans conséquences...

- Serre-moi fort pour que je m'en souvienne tout à l'heure quand je me réveillerai... comme ça..., demanda-t-elle avec un soupir d'aise.

Elle avait toujours cru que si elle rêvait de lui un jour ce serait forcément un rêve érotique. Là ça n'était pas du tout le cas même si c'était très tendre. Tout ce dont elle avait besoin. Peut-être parce que sans s'en rendre compte, à force de voir et de revoir Coltrane, à force du temps qui passait, elle avait commencé à tourner la page. Ce rêve, elle le faisait maintenant probablement parce que pour la première fois en quatre ans, elle n'avait pas pensé à lui en passant une soirée avec un autre homme. Même s'il ne s'était rien passé (enfin si c'était le cas elle ne s'en rappellerait qu'au réveil), quelque part elle culpabilisait déjà. Elle ne se sentait pas vraiment prête à laisser partir Emìr, ni à tourner la page sans avoir son aval. C'était drôle à dire parce qu'étant donné la situation, c'était une chose qu'elle ne risquait pas d'avoir. Alors en attendant, elle se rassurait comme elle pouvait, un sourire transi de bonheur sur les lèvres. Tout était exactement comme avant et ça ne durerait que jusqu'à ce que le réveil sonne. Alors...

« J'ai aucune idée de ce dont tu me parles ça à l'air d'être... du grand n'importe quoi. Mais je m'en fous. J'ai envie de profiter de ce moment avec toi puisque c'est le seul que j'ai eu en quatre ans et s'il faut le seul que j'aurais plus jamais. »

Emìr éclata de rire, tandis qu'elle lui saisissait la main pour se tirer à lui, se lovant ainsi contre lui, avec une moue amoureuse. Le regard d'Emìr ne put s'adoucir plus qu'il ne l'était en ce moment précis, à moins de fondre devant Siobhán.

« Serre-moi fort pour que je m'en souvienne tout à l'heure quand je me réveillerai... comme ça... »

Ainsi soit-il. Il la serra un peu plus, rapprochant ses bras, l'étreignant avec une force modérée, mais pleine de passion. Il déposa un léger baiser sur ses cheveux. Cela faisait peut-être plus de quatre ans maintenant qu'il attendait un tel moment de rapprochement avec l'amour de sa vie. Elle était là, dégageant ce léger parfum à la fois acidulé, mais très femme également. Il eut un léger soupir apaisé, avant de déployer ses ailes, se téléportant dans leur chambre dans une douce lumière apaisante, accompagnée d'une petite brise d'été. Il la souleva tout à coup, lui attrapant les jambes avec son bras avant de poser genou sur le lit, et la déposait dessus comme une princesse. Rangeant ses ailes à son tour, il se coucha près d'elle, retirant ses chaussures d'un rapidement mouvement de pieds, avant de poser sa tête sur sa main.

« Même si je risque de disparaître quelques heures, voir jours, certains moments de la vie, je... Enfin, si tu veux, revenir vivre avec toi, pour... C'est juste que j'ai de nouvelles obligations, maintenant que je... Que je suis un... Que je suis un messager d'Allah. »

Dit-il, avec un léger sourire plein d'admiration. Il balaya, de son autre main, une mèche sur le visage, la calant derrière son oreille. Rapprochant son visage du sien, il déposa un léger baiser sur ses lèvres.

« ... ... ... Emìr ? Mais... comment... ça s'est vraiment passé ? Hier... »

Les cries de stupéfaction de Siobhán eurent raison de son sommeil. Il sursauta légèrement, se redressant à peine, la visage encore endormie. Il se frotta les yeux d'une main, avant de finir par se redresser, s'asseyant en tailleur dans le lit. Il était encore assoupis de sa nuit, et elle... Elle, elle était déjà surexcitée, survitaminée, sur... Sur-Siobhán, en faites. Il esquissa un léger sourire, tandis qu'elle reprenait, après lui avoir tourné le dos, comme si elle jouait une scène de stupéfaction dans une série du genre : Friends, Earl, 'fin, un truc comique quoi.

« C'est pas possible ça ! Ca n'arrive que dans ... dans... dans Ghost ! ou ..."Et si c'était vrai!" ..."Extrem Ghost Buster"... ou Last Vegas Parano! Ca n'existe pas dans la vrai vie... enfin... Pas vrai ? »

Las Vegas Parano ? LAS VEGAS PARANO ? Après avoir tiré une tête de six pieds de long, du genre, mais elle fume quoi, bon sang ? Emìr balança machinalement son regard sur les tables de chevet, comme pour y trouver un sachet d'herbes qu'il n'aurait pas vu la veille. Puis, il éclata de rire, avant de sortir ses ailes à nouveau, ses yeux reprenant une délicate couleur bleutée (ce qui restait assez surprenant vu son teint de peau, mais surtout la façon dont ces derniers semblaient toujours maquillés avec un fin trait de khôl). Il battit des ailes, un sourire amusé sur son visage, avant de les faire disparaître à nouveau, ses yeux reprenant leur teinte normale.

« Écoute, je sais que c'est pas facile à comprendre, mais... Je pensais que tu avais compris, en faites. A moins ce que tu sois un Ange en devenir, je pensais que tu étais une sorcière ou un truc comme ça, pour que le Conseil m'envoie à tes côtés pour te protéger et te guider... »

Il esquissa un léger sourire, avant de se relever, saisissant son jean, qu'il enfila rapidement. Il s'approcha de la jolie blonde, déposant un léger baiser sur ses lèvres, avant de prendre la direction de la cuisine, un petit air mutin sur son visage. Quoiqu'elle pouvait bien penser, lui, il était aux anges.

Mettant la machine à café en route, tout en préparant de quoi déjeuner, Emìr reprenait plus rapidement que prévu tout ces petits gestes qu'il n'avait plus fait depuis un peu plus de quatre ans, comme s'il ne les avait jamais oublié, continuant malgré tout à les reproduire au quotidien. Son cœur battait lentement, son souffle était calme, discret, ses pensées étaient apaisées, et jamais il ne s'était sentit aussi bien depuis qu'il avait obtenu le statut d'Être de Lumière. Ce qui ne semblait pas être le cas pour Siobhán qui ne cessait de s'agiter intérieurement, avec cette peur de le revoir partir. Emìr, lui, était persuadé que, désormais, il avait cette chance, cette possibilité de ne plus jamais l'abandonner, même si la première fois (et la seule fois) ne fut pas sa faute, mais celle de... Il se passa machinalement une main sur la tempe, comme si la douleur de l'impact lors de sa mort revenait lorsqu'il y repensait. Siobhán continua :

« Je ne crois pas être rien de tout ça Emìr. J'veux dire... j'aurais remarqué. J'ai jamais - je sais - disons... J'ai jamais fait gonfler ma grosse tante énervante, je parle pas avec les animaux comme ... Dora l'exploratrice! Oui je sais : mauvais exemple. Mais si je peux rien faire de tout ça alors toi... et moi ... »

Emìr se retourna vers sa jolie femme, un sourire sur ses lèvres. Il représentait bien tous les deux leurs status. Lui, l'Ange, apaisé, calme, sachant très bien comment faire, comment réagir, comme voir les choses, et elle, la femme, l'humaine, qui, devant le surnaturel panique comme une demeuré, car elle ne sait pas du tout comment gérer la chose. Il s'approcha d'elle, l'enlaçant par la taille, avant de la tirer vers lui.

« Arrête de te prendre la tête, et profite de l'instant présent. Je suis là pour te guider, tu dois bien avoir quelque chose pour qu'ils m'aient permis de venir te voir, au risque de te déboussoler totalement. Ou alors, c'était peut-être pour me tenter... » Il eut un petit rire amusé, avant de rajouter : « Mais... Et dans ta famille ? Je les trouvais un peu louche de mon vivant, ils doivent peut-être en savoir un peu plus, non ? »

« Je parie que tu les trouveras beaucoup moins louches quand ils auront fait une crise cardiaque envoyant que je leur ramène mon petit ami décédé mais si tu veux on peut regarder quand part le prochain avion... »

Hein ? Le prochain avion ? Emìr éclata tout bonnement de rire, au point d'en pleurer. Il savait très bien qu'elle devait sûrement ignorer que la téléportation était dans ses cordes, ou avait-elle tout simplement oublier qu'il l'avait amené dans la chambre de la sorte. Il n'en savait rien, après tout, il avait dû lui causer un sérieux choc émotionnelle en réapparaissant comme ça, au bout de quatre ans, alors qu'elle le pensait mort, qu'elle avait accompagné son corps en Turquie pour qu'il y soit mis en terre. Emìr ne put s'empêcher de se demander si son véritable corps était là bas, où si son corps d'ange n'était qu'en faites, l'ancien, qu'ils avaient... Modifié. Une bonne question qu'il s'empresserait de poser plus tard, à d'autres anges.

« L'avion ? Je suis comme Diablo, ma chérie. » Lui fit-il avec un sourire à peine prétentieux.
« Je veux bien t'accorder que ma mère est un peu spéciale avec ses tisanes. Dire qu'on nous fait des stages en veux-tu en voilà sur les méfaits de l'automédication. Si le gouvernement américain pouvait voir cette femme-là, il investirait probablement l'argent public dans autre chose... »

Emìr éclata de rire, avant de reprendre :

« Tu as quelque chose à faire aujourd'hui ? Pourquoi ne pas y aller tout de suite ? »

...

Partir en Écosse retrouver la famille de Siobhán avait quelque chose d'effrayant pour Emìr qui se faisait sûrement tout un programme pour pas grand chose. Il savait très bien la perte qu'il avait été pour leur fille, leur sœur, et savoir qu'en réalité, il était encore là, pouvait vous rendre mesquin, lorsque ce dernier réapparaît, comme ça, un beau jour, sans que rien ne le laisse présager. Tout du moins, si l'on avait pas consulter les étoiles, ou encore le marc de café, pour ne citer que ces exemples. Emìr en avait la boule au ventre, et lorsqu'il enlaça Siobhán contre lui, pour aller en Écosse, il avait failli lui demander de repousser l'échéance, même si, bon, la couardise n'était pas de mise chez un messager d'Allah. C'est donc, en serrant les dents, qu'ils apparurent un peu au milieu de nul part - c'était comme ça qu'Emìr voyait l’Écosse -, entouré de vert, d'un ciel qui oscillait tantôt bleu, tantôt gris. Il soupira, se frottant machinalement les bras, regrettant de ne pas avoir mis un pull. Le mois de mars écossais était de loin différent du mois de mars californien.

Ils s'avancèrent vers la grille du domaine, où la plus jeune sœur de Siobhán vint à leur rencontre. Machinalement, Emìr prit la main de sa femme, sortant de l'ombre du pilier qui tenait la grille. Son regard ambré croisa le regard bleu de Muadhnait, et deux petites filles toute magnifique, qu'Emìr ne connaissait pas. Il lui fit un sourire mutin, avant de plonger son regard dans ceux des fillettes. Il avait quelque chose de très... Comment dire, angélique ? Emìr dégageait une aura apaisante, mais qui ne sembla pas convaincre Munny. Il tourna son regard vers Siobhán, qui, elle, semblait de nouveau elle-même. Écossaise au bout des ongles, malgré sa vie en Californie.

« Vous devez être... Tariq ? » Emìr vit le sourire forcé, et le regard assassin à l'égard de sa soeur. Se redressant après avoir saluer les filettes, il secoua la tête, avec un sourire apaisant.
« Non, non, c'est bien Emìr. Je crois qu'on a besoin de réunir toute votre famille, pour qu'on en discute. »

Emìr ne put retenir un soupir de soulagement lorsque Munny éclata d'un rire soulagé. Il esquissa par la suite un sourire, tandis qu'il ne cessait de jeter des regards aux deux petites têtes blondes, déjà si Fhaolain. Machinalement, il redressa son regard vers Siobhán. Un de ces regards qui vous demande subliminalement (quoique...) : Et nous ? Quand est-ce qu'on en fait ? Mais l'heure n'était pas à ça, il fallait se montrer au reste de la longue famille de sa jolie blonde, pour comprendre la raison de ses supérieurs. Emìr ne pouvait s'empêcher de sourire, à chaque fois qu'une des sœurs de Siobhán se joignait à eux. Malgré le fait qu'elles ressemblaient beaucoup plus à leur mère qu'à leur père, Emìr n'arrivait non sans mal à trouver ce qu'il aimait chez cette fratrie si soudée : Leur façon d'être respirait Siobhán comme si elles n'avaient été que des copies plus ou moins proche de cette dernière.

Visiblement aux anges, il ne tarda pas à rejoindre l'enceinte de la résidence Fhaolain, et lorsqu'ils ouvrirent les portes, qu'il pénétra ces dernières, son regard devint plus sérieux, mais à la fois, beaucoup plus sûr de lui. Si de par le passé, Emìr avait pu donner une impression de jeune homme sans trop de confiance en lui, là, c'était tout le contraire. Néanmoins, ça ne semblait pas être jusqu'à l'excès. Parfaitement dosé, dirons-nous. Son regard devint légèrement bleuté, tandis que les soeurs de Siobhán les firent entrer dans le salon où son père et sa mère étaient assis, sûrement à prendre le thé - les anglais adorent ça (Emìr ne faisait toujours pas la différence entre, pour lui, ils vivaient sur la même île, alors pourquoi s'embêter à les différencier ? Néanmoins, allez lui dire qu'il est magrébin, et non turc, et vous risquez de vous faire envoyer sur les roses. Comme quoi...)

Si la mère de Siobhán lui fit un sourire radieux, alors que les filles de cette dernière allaient les rejoindre, le père, Noamhán, quant à lui, semblait se refroidir avec la force d'un blizzard scandinave (on était bien en Scandinavie, non ? 'fin, l’Écosse était sûrement une région ou un truc du genre - Oui, la géographie n'était pas son fort, heureusement qu'il n'avait pas besoin de détails lorsqu'il voyageait par sa magie, sinon, il serait pas arriver). Emìr croisa son regard après avoir rendu le même sourire à sa belle-mère. Il conservait ses positions, sans pour autant le défier. Il n'était pas là pour ça.

« J'imagine que vous avez des explications à nous donner. »

Emìr tiqua, mais n'en dit rien. Il serra un peu plus fort la main de Siobhán, posant son regard sur cette dernière, avant de répondre directement, sans prendre des gants :

« Je suis un ange. A ma mort, ils sont venus me prendre pour faire partit des leurs. Visiblement, j'étais quelqu'un de bon ! » Dit-il avec un sourire aux soeurs de Siobhán, comme pour tenter de détendre l'atmosphère. Il reporta son regard vers son beau-père. « Ce matin, ou plutôt ce soir (décalage horaire), on n'a pas trouvé la véritable raison de mon retour auprès de Siobhán. Quand on devient un Ange, on nous fait juré de ne pas nous rendre auprès des notre de notre propre chef, pour éviter de les déboussoler, de leur faire revivre de vieux démons du passé, parfois encore bien présent. » Il caressait doucement de son pouce, la main de Shiobhán, qu'il tenait toujours avec la même intensité. « Du coup, deux raisons s'ouvrent à nous : Soit, Siobhán est prévue à faire de grande chose, ou soit elle est une sorcière, et donc, vous également. »

Un point commun entre lui et son beau-père : Quand on pouvait éviter de passer par des chemins escarpés, il ne fallait pas hésiter à prendre les sentiers battus. Lorsqu'il termina sa phrase, il retint son souffle sans même s'en apercevoir, étant donné que ça faisait un peu... Conversation à la dynamite.

« Dans l'un ou l'autre cas, il n'y a qu'une personne ici qui puisse nous éclairer... » Emìr hocha de la tête, avec un clignement d'yeux affirmatif. Il n'y avait rien de magique qui émanait du patriarche du clan Fhaolain sauf, les dépôts de l'aura que lui avait apposé sa femme au cours de leur vie conjugale. Les yeux d'Emìr avaient reprit leur teinte bleuté lui donnant un visage défiant les divinités et les héros d'un temps depuis longtemps passé. Il sursauta à son tour, lorsqu'une voix mal assurée se fit entendre, parmi le clan. Machinalement, il se redressa sur la pointe de ses pieds, avant de poser son regard sur le fils aîné d'Aoibheann qui s'excusait presque lorsqu'il prit la parole.

« ... peut-être... peut-etre que non... ? » A nouveau Emìr sursauta, lorsqu'il vit le petit se téléportait devant Muadhnait, qui rajouta : « Et moi aussi. », reprit Muadhnait à côté de qui Aodhán se trouvait à présent. « On a gardé le secret parce que... c'est un peu bizarre quand même non ? »

Emìr lança un regard amusé vers le patriarche, avant de regarder Siobhán qui semblait tout aussi désorientée que son père. Il l'attira contre lui, la serrant avec amour, comme pour la protéger de toutes ces nouvelles pour le moins... Surprenante. Il regarda alors Aileen, avant de se redresser de toute sa hauteur, et de sortir ses ailes. Il ne les sortait pratiquement jamais, mais en l'espace de deux jours, il n'avait fait que ça. Et bizarrement, il y prenait un certain plaisir. Le plaisir de montrer au monde qui il était vraiment : Le messager d'Allah.

« Je crois qu'il est temps de jouer carte sur table. Je suis peut-être jeune dans mon domaine, mais je commence à comprendre le pourquoi du comment ils m'ont remis sur votre chemin. Je suis votre Protecteur. » Il eut un sourire, comme apaisé. Il savait dès à présent qu'il était là pour Siobhán, et qu'il ne pourrait la quitter comme ça.

« Je crois qu'il est temps de jouer carte sur table. Je suis peut-être jeune dans mon domaine, mais je commence à comprendre le pourquoi du comment ils m'ont remis sur votre chemin. Je suis votre Protecteur. »

A voir le haussement de sourcil du chef de clan ça n'était pas pour lui plaire. En bon écossais qu'il était on pouvait bien le comprendre. Il ne dit cependant rien et laissa les femmes gérer cette situation. Quand aux ailes d'ange, là non plus il ne fit aucun commentaire. Ce fut les enfants qui montrèrent le plus d'émerveillement.

Aileen ne fut pas surprise de ce qu'Emìr venait d'annoncer. Son propre ange gardien l'avait quitté il y avait de cela presque quatre ans en lui annonçant qu'un autre biendrait la remplacer. Il se trouvait que l'ange en question n'était autre que la banshee attachée au clan Mc Gill Fhaolain. Là dessus, la mère de famille prit son ex-genre à part pour discuter de ce qu'il allait se passer et de ce qu'elle pensait de tout cela. Il lui paraissait fort peu probable que son petit fils et sa dernière née soient les seuls à avoir hérité de dons, d'autant qu'elle avait 7 filles. Un nombre qui en disait trop long. 3 petits fils (là encore la coïncidence semblait un peu forte de café...)...

« ... et pour l'instant deux petites filles...», glissa-t-elle avec un brin de malice.

Etait-il possible qu'elle ait lu dans les pensées d'un ange...?

Les enfants le regardèrent avec émerveillement tant est si bien qu'il ne savait plus comment se mettre. Les regards étaient sur ses ailes, et même si l'ensemble de la famille semblait accepter avec facilité la nouvelle, il y en a un qui le regardait avec une expression à faire froid dans le dos. Emìr croisa son regard sans pour autant ciller. Qu'il le veuille ou non, il devrait le supporter. Il était humain, il était une créature chérie de Dieu, et Emìr était son messager. Ils seraient obligés de s'entendre, et Noamhán devrait prendre sur lui dans de pareil mesure. D'autant plus qu'il se sentirait vite désarmés si jamais les choses devaient mal se passer. Pas forcément face à Emìr, mais face au force du mal. Emìr reporta son regard sur la mère des Mc Gill Fhaolain avec un sourire presque complice.

Il la suivit rapidement lorsque cette dernière lui intima de le rejoindre à l'écart de la famille. Lorsqu'il passa, il laissa les enfants tendre les mains vers ses ailes, avant de les faire disparaître dans un scintillement d'un blanc pur. Ses yeux reprirent leur couleur habituel, et lorsqu'il ferma la porte, elle acheva ses pensées (celle d'Emìr) à voix-hautes.

« ... et pour l'instant deux petites filles...», glissa-t-elle avec un brin de malice.

Emìr eut un petit sourire amusé, en comprenant qu'elle lui dévoilait l'un de ses pouvoirs, comme pour le mettre en confiance. Il lança un regard autour de lui, posant son regard sur les diverses photos du clan Fhaolain, avant de se mettre à réfléchir tout haut.

« Sept enfants... Pour l'instant, trois petits-enfants... Soit les autres l'ignorent, soit ils préfèrent se taire. Les symboles et la puissance magique que dégagent ces chiffres habituellement ne sont pas sans fondement. Je suis, certes, encore un novice dans le milieu de la magie, mais quand même... » Rajouta-t-il, riant. « Siobhán ne semble pas savoir le sien, et ça, j'en suis sûr. Aviez-vous tenté de leur enseigner la magie quand ils étaient plus jeunes ? »

Emìr éclata de rire aux mots de sa belle-mère. Siobhán dans toute sa splendeur. Cette dernière était bien trop terre-à-terre de nature pour avoir penser qu'un jour, si ce n'est durant son enfance, que la magie pouvait belle et bien exister. C'était une fille rompue à toutes sortes de choses, mais il y avait certaines choses où elle semblait encore être cette petite fille innocente que sa mère décrivait si bien. Vivre aux États-Unis avait palier à un des plus gros problèmes de Siobhán. La cuisine. Il s'essuya les yeux des larmes de joies avant de reprendre un peu de sa contenance. Il ne savait jamais réellement comment il devait se comporter en tant que protecteur. Quand les personnes n'avaient rien de magique, il jouait toujours un rôle de sorte à ce qu'il soit mis en confiance avec ladite personne, sans jamais lui annoncer qu'il était un ange, afin de garder le secret sur la magie et tout ce qui s'en suivait. C'était bien plus facile pour lui de se faire passer pour quelqu'un qu'il n'était pas. D'ailleurs, grâce à cela, il savait désormais parlé toutes les langues. Intervenir en Italie avait été une agréable surprise quand il s'était entendu répondre dans un italien parfait et sans accent, alors qu'avant de mourir, il ne comprenait rien à cette langue si ce n'est le mot Pizza (c'est dire).

Après avoir passer son regard sur les photos qu'il y avait dans la pièce, les deux petites de Munny apparurent, se faufilant entre leurs jambes, comme pour prendre part à leur conversation. Emìr caressa les cheveux de celle qui était le plus prêt de lui, avec un sourire tranquille.

Tout d'un coup, il se redressa, faisant mine de tendre l'oreille. Un son de carillon se faisait entendre dans sa tête, puis des mots, un appel. Une de ses protégées, Judith. Il sourit, posant son regard, vers la matriarche du clan Fhaolain, et il s'écria : « Je dois y aller, je pense que vous devriez leur expliquer tout ce dont ils ont besoin, et les initier plus particulièrement à la magie maintenant. Mon apparition auprès des votre aura sûrement provoquer un effet négatif, puisque les forces doivent s'équilibrer auprès des Humains, afin de leur laisser l'intégralité de leur libre arbitre. Je reviens, de toute manière. »

Il se recula, contournant le fauteuil pour aller embrasser le front de Siobhán dans l'autre pièce avant de se diriger dans le couloir, pour s'éclipser en Italie.